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Transmettre de son vivant : ce que disent réellement les règles fiscales

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La transmission patrimoniale est souvent repoussée au dernier moment, par crainte de se déposséder ou par méconnaissance des règles. Pourtant, le droit français offre un cadre clair et relativement stable pour organiser des donations progressives, à condition d’en maîtriser précisément les mécanismes et les plafonds.
 

Le Code général des impôts prévoit des abattements applicables aux donations consenties de son vivant, renouvelables tous les quinze ans. Le dispositif le plus connu concerne la transmission entre parents et enfants : chaque parent peut donner jusqu’à 100 000 euros par enfant sans droits de donation. Pour un couple, cela représente donc 200 000 euros transmissibles à un enfant sur une période de quinze ans, en franchise totale de droits.
 

Ce mécanisme n’est pas réservé aux seuls patrimoines élevés. Il constitue le socle ordinaire de la fiscalité successorale française et vise à encourager une transmission anticipée, étalée dans le temps, plutôt qu’un transfert massif au moment du décès.
 

Des abattements adaptés aux liens familiaux
Le législateur a décliné ces abattements selon les liens de parenté. Un grand-parent peut ainsi donner jusqu’à 31 865 euros à chacun de ses petits-enfants, également tous les quinze ans. Entre époux ou partenaires de PACS, l’abattement s’élève à 80 724 euros. Les transmissions entre frères et sœurs bénéficient d’un abattement de 15 932 euros, tandis que les donations aux neveux ou nièces sont exonérées jusqu’à 7 967 euros, sous certaines conditions.
 

Ces montants peuvent paraître modestes pris isolément, mais leur renouvellement périodique permet, dans la durée, d’organiser une transmission significative sans recourir à des montages complexes.
 

Le don familial de somme d’argent, un levier souvent sous-utilisé
À ces abattements classiques s’ajoute un dispositif spécifique : le don familial de somme d’argent. Il permet à un parent, un grand-parent ou un arrière-grand-parent âgé de moins de 80 ans de transmettre jusqu’à 31 865 euros à un descendant majeur, en numéraire, sans droits de donation. Cet abattement est cumulable avec les abattements classiques et, lui aussi, renouvelable tous les quinze ans.
 

Concrètement, un parent de moins de 80 ans peut donc donner à un enfant majeur jusqu’à 131 865 euros tous les quinze ans sans fiscalité, en combinant l’abattement parent-enfant et le don familial de somme d’argent. Ce mécanisme est particulièrement utilisé pour accompagner un projet précis : acquisition immobilière, création d’entreprise ou financement d’études.
 

Démembrement : transmettre sans se dessaisir
La donation peut également porter sur la nue-propriété d’un bien, le donateur conservant l’usufruit. Fiscalement, la valeur transmise est alors réduite selon un barème légal fondé sur l’âge de l’usufruitier, publié par la DGFiP. Cette technique permet d’anticiper la transmission tout en conservant les revenus ou l’usage du bien, notamment dans le cas de l’immobilier ou de portefeuilles de titres.
 

Si le mécanisme est puissant, il suppose une parfaite compréhension des droits et obligations de chacun. Le démembrement ne relève pas de l’optimisation agressive, mais d’une logique de temps long, cohérente avec une stratégie patrimoniale réfléchie.
 

Anticiper pour éviter les effets de seuil
Le principal risque, en matière de transmission, est l’inaction. Attendre le décès pour transmettre revient souvent à concentrer la fiscalité sur un événement unique, avec moins de marges de manœuvre. À l’inverse, étaler les donations dans le temps permet de lisser la charge fiscale, de clarifier les intentions familiales et de réduire les risques de conflits successoraux.
 

Comme le rappellent régulièrement les Notaires de France, les transmissions les plus efficaces ne sont pas nécessairement les plus sophistiquées, mais celles qui ont été anticipées suffisamment tôt, en utilisant pleinement les dispositifs existants.